Au-delà de leur programmation propre, plusieurs musées partagent un objectif commun : créer des liens entre nous, caribéens, et enrichir notre histoire collective.
Du 12 au 16 novembre 2019, la Martinique accueille la 30ème Assemblée Générale de l’Association des Musées de La Caraïbe ( MAC : Museums Association of the Caribbean). Créée en Dominique autour d’Alissandra Cummins (Barbade), Anita Ebanks, Lyne-Rose Beuze et Madeleine de Grandmaison, et fondée pour « créer un réseau accessible et visible pour les musées de la caraïbe et les professionnels pour partager leurs connaissances et leur expertise », l’association est un acteur, à l’échelle de la Caraïbe, de l’Amérique latine et au sein de la communauté d’Afro-descendants d’Amérique du Nord, de la question de l’héritage et du patrimoine.

La conseillère exécutive de Martinique en charge de la culture, Marie Hélène Léotin, au moment de poser la candidature de la Martinique pour accueillir cette édition anniversaire, décrivait « un pont de plus que nous construisons avec cette Caraïbe si proche et si lointaine. Si proche, car seulement une trentaine de kilomètres sépare nos différentes îles et nous sommes venus dans le même bateau. Si lointaine, car la colonisation nous a séparés et reliés à des métropoles qui nous ont imposé leur langue, leur histoire et leur culture ». Et l’élue de s’enthousiasmer pour cette mise en commun des compétences et des réflexions des Musées de La Caraïbe, « une excellente occasion de renforcer nos liens pour un avenir meilleur pour nos enfants et pour nos peuples ».
La tâche est noble et vaste. La question des origines à l’échelle de peuples éparpillés dans toute la Caraïbe est sans aucun doute une des clés de l’identité de chacun. La MAC porte la volonté de développer les liens, les échanges, la formation pour une meilleure connaissance et un meilleur management, à la fois des Musées d’art contemporain, des Musées d’histoire et d’ethnographie, et des centres d’interprétation comme Le Mémorial Acte de Guadeloupe. Jacques Martial, président de ce dernier, explique que « les musées sont des lieux essentiels pour parcourir la culture et faire relation entre nous. Capables de créer des circulations et de permettre de penser la mer comme espace de relation et non pas ou non plus comme un espace qui divise ». A quoi ressemblent ces musées réunis autour de cet enjeu commun ?
Premier coup de projecteur sur 4 établissements.
Museo Fernando Peña Defilló
République Dominicaine
En réunissant la collection privée d’un grand maître de la peinture dominicaine, le musée Fernando Peña Defilló met en exergue la quête de l’artiste pour toujours redécouvrir la réalité de son pays. Il retrace, en ses murs, son parcours créatif au cours des différentes étapes de sa vie entre 1951 et 1963. Il a peint jusqu’en 2016, l’année de ses 90 ans, fidèle à ses thèmes de prédilection, le monde paysan, la nature, la condition humaine ou encore la religion catholique, au cœur d’un monde de sensations visuelles, personnelles et sociales.
Perez Art Museum Miami (PAMM)
Etats-Unis / Miami
De la création de l’emblématique installation d’art public de Christo et Jeanne-Claude en 1983 à la collecte des œuvres en 1994, à sa réouverture à Museum Park et à sa renommée internationale en 2013, la PAMM a eu un impact durable sur l’histoire culturelle de la ville, contribuant à faire de Miami la capitale internationale de l’art. L’exposition du moment : Beatriz González, une rétrospective mettant en avant l’artiste emblématique et fondamentale de la scène artistique de l’Amérique latine dont le travail convoque l’histoire, la politique, l’humour, le privé et le public. Se déclarant « peintre de province », elle a mis en cause la relation de subordination entre des contrées marginales telles que la Colombie et les centres hégémoniques de production artistique et culturelle représentés par l’Europe et les États-Unis. Son projet repose sur une évaluation plus large de l’état de la culture dans son pays d’origine et de sa relation avec l’héritage persistant du colonialisme.

National Museum of African American History & Culture (NMAAHC)
Etats-Unis / Washington
Le Musée national d’histoire et de culture afro-américaine est le seul musée national consacré exclusivement à la documentation sur la vie, l’histoire et la culture afro-américaines. À ce jour, le Musée a rassemblé plus de 36 000 artefacts et près de 100 000 personnes en sont devenues membres. Les 12 premières expositions du musée ont été conçues pour aider les visiteurs à mieux comprendre l’histoire et la culture américaines et à s’adapter aux nouvelles définitions de la citoyenneté, de la liberté et de l’égalité américaines. « Ce musée racontera l’histoire américaine à travers le prisme de l’histoire et de la culture afro-américaine. Il explore ce que signifie être américain et explique comment des valeurs américaines telles que la résilience, l’optimisme et la spiritualité se reflètent dans l’histoire et la culture afro-américaines ».

Memorial ACTe
Guadeloupe
Le MACTe, ouvert au public depuis le 7 juillet 2015, est un lieu unique. Plus grand musée au monde dédié à l’esclavage, le MACTe répond à la mission de construire une mémoire collective à propos de cette étape historique, fondatrice de la modernité du monde.
Une œuvre emblématique : l’arbre de l’oubli
« L’arbre de l’oubli, de l’artiste camerounais Pascale Marthine Tayou, représente l’étape du déracinement dans l’enlèvement des hommes et des femmes en Afrique. L’œuvre fait référence à un rituel où les hommes et les femmes devait tourner respectivement 9 et 7 fois autour d’un arbre, avec le projet de leur faire oublier leurs origines, leur religion, leur famille, leurs ancêtres, tout ce qui fait humanité. Faire venir cet arbre de l’oubli à nous, c’est se donner une chance de déconstruire le vœu lié à cette pratique et de rappeler la mémoire à nous ». Jacques Martial, Président du Mémorial ACTe.
Memorial ACTe L’arbre de l’oubli