Mas’Moul Massif, le groupe a Mas du Moule, multi récompensé en Guadeloupe et à Paris, tente de combler le vide laissé par l’annulation du carnaval. – Texte Willy Gassion, Photo Alain Hannibal
C’est comme retrouver de vieux amis au même endroit et à la même période. Un an a passé depuis notre dernière rencontre avec le groupe Mas’Moul Massif. Les mines sont défaites et les jours heureux du carnaval semblent loin.
Il y a un an, le même soir, c’était une joyeuse cacophonie au local du Mas’Moul Massif. Ça riait, ça plaisantait, ça parlait fort, les idées fusaient, et Thierry Fulbert, le président de l’époque, devait faire preuve d’autorité.
Cette année, tout a changé, c’est un temps de chien, le local est désert, Royette Létang, la nouvelle présidente nous accueille avec Dominique Mirre, sa vice-présidente et Jean-Pierre Anzala dit Mouny, « c’est mon nom sauvage », musicien et membre historique du groupe.

Une belle saison 2020
Malgré l’atmosphère funeste, l’association « se porte bien », se réjouit Royette. Les membres sont toujours aussi nombreux (plus de 700), juste refroidis par l’annonce de l’annulation du carnaval.
« La saison dernière a été belle, nous avons participé à tous les défilés, le confinement est arrivé après le carnaval. »
Faute de carnaval à préparer, Mas’Moul Massif « se projette déjà en 2022 » mais pour l’heure, les discussions sont celles des bilans. Comme pour se rassurer, comme pour se consoler d’un chagrin. Trouver, dans le passé glorieux, les raisons de continuer.
« Il y a beaucoup de jeunes au sein de l’association, avec le partenariat de Pôle Emploi, nous avons conduit des projets dans l’insertion professionnelle. »
« A chacune de nos réunions au local, nous mettions à la disposition des jeunes et aussi des adultes, une sélection d’offres d’emploi à consulter.
Avec la Ville du Moule, dans le cadre des contrats aidés, nous avons proposé la candidature de certains de nos jeunes, et aujourd’hui quelques-uns d’entre eux sont agents territoriaux. »

S’entrainer pour évacuer le stress
En attendant des jours meilleurs, Mas’Moul Massif veut occuper le terrain pour ne pas laisser ses membres et spectateurs dépourvus. Tels des orphelins.
« On souffre un peu de ne plus pouvoir se voir, nous ne sommes pas que des carnavaliers, mais aussi des amis. »
Le groupe va organiser, avec ses musiciens, des entraînements dans le jardin clos de son local, « dans le respect des gestes barrières et sans carnavaliers » et aussi des directs live sur les réseaux sociaux.
Selon Dominique Mirre, la vice-présidente, ces « entrainements permettront d’évacuer le stress né du confinement » et d’atténuer la déception de ne pas pouvoir défiler.
« Le 1er dimanche de l’année a été difficile pour tout le monde, pour le groupe bien sûr, mais aussi pour la ville du Moule. Chaque année, nous défilons en rouge et noir dans notre ville, c’est un moment attendu. »

« On n’aurait pas raté Trump »
Ils ne souhaitent pas trop en dire, mais ils reconnaissent tout de même à demi-mot qu’ils avaient déjà réfléchi aux thèmes qu’ils entendaient présenter cette année. « On n’aurait pas raté Trump. »
L’actualité avec ses vicissitudes a été généreuse, ils citent : le mouvement Black Lives Matter, l’arrivée des vaccins… mais aussi « les femmes et les hommes valeureux de la Guadeloupe dont il faut toujours faire la promotion ».
Mas’Moul Massif a très vite vu dans la Covid, alors peu médiatisée en Guadeloupe, le thème d’une de leurs sorties du dimanche lors du carnaval 2020.
« On travaille beaucoup avec les jeunes et ils sont notre force, ils nous ont très vite alerté sur la Covid alors que les médias en parlaient peu, grâce aux réseaux sociaux, ils ont vu arriver l’ampleur du phénomène et ils nous ont suggéré ce thème. »

On ne pouvait pas se quitter sans musique. Mouny se lance dans une improvisation sur son tambour a mas, il dit qu’il est un peu « rouillé », il cherche ses notes mais nous trouvons déjà ça très bien.
« Avec les années, notre corps musical s’est amélioré, si on est autant imité sé ke nou fo mèm ! On a apporté un souffle nouveau au carnaval, une nouvelle sonorité », se félicite Mouny.
A lire aussi…